Etape
81 - Grèce - A l'entrée du sanctuaire sacré
de Delphes
Samedi 10 juillet 2021. Enfin me
voici dans le saint des saints, l'endroit le plus sacré
de toute la Grèce antique, le lieu que je rêvais de
découvrir... Le sanctuaire de Delphes. Et je mesure
encore une fois la chance que j'aie, je suis quasiment seul pour
le visiter. D'habitude, ce sont des milliers de touristes qui arpentent
les chemins qui mènent jusqu'au sanctuaire. Mais Covid oblige...
Je peux faire des photos sans nulle trace d'aucun autre humain.
Tout simplement incroyable.

Delphes fut longtemps considéré
comme le centre du monde antique. La mythologie raconte
que Zeus fit décoller deux aigles d'une extrémité
à l'autre de la terre, et qu'ils se sont rencontrés
ici...

Ainsi naquit l'omphalos, littéralement
le "nombril du monde". Il faut dire qu'Apollon,
fils de Zeus, ne s'était pas trompé : l'endroit
est sublime, le panorama moutonne en oliveraies qui glissent lentement
vers la mer...

Delphes tire son nom du grec ancien
Delphinos, car c'est ici qu'Apollon aurait pris l'apparence
d'un dauphin pour attirer une bande de marins afin de les convaincre
de devenir des prêtres.

Autrefois le village de Delphes
couvrait entièrement l'antique cité, rendant les fouilles
impossibles. C'est l'école d'archéologie française
d'Athènes, qui, à la fin du XIXe siècle, a
convaincu le gouvernement grec de déménager le village...

Aujourd'hui Delphes est le
site archéologique le plus visité après l'Acropole.
Son musée est également d'une richesse exceptionnelle.

Pour visiter le sanctuaire,
il faut d'abord trouver une place où se garer au pied du
site, ce qui est un jeu d'enfant... juste après la seconde
vague de covid ! J'ai vraiment une chance inouïe ! Je l'ai
déjà dit, je crois...

Ensuite, il faut pénétrer
dans le site et emprunter la voie sacrée. C'est elle
qui serpente à travers la colline et qui remonte jusqu'à
son sommet. Elle a conservé son tracé initial.

Elle part de l'agora, la grande
place dallée où se trouvait les boutiques pour les
emplettes des visiteurs et où démarraient les processions
lors des grandes fêtes du sanctuaire.

Son parcours était jalonné
de monuments votifs et, surtout de "trésors", des
ouvrages d'art édifiés par les différentes
cités-états pour célébrer une victoire
et y accueillir les offrandes de leurs concitoyens.

Pour marquer leur puissance, elles
rivalisaient d'audace en matière d'architecture, sans parler
des richesses qu'elles y consacraient.

Plutarque s'indigna d'ailleurs de
cette débauche de luxe permise seulement par les guerres
et les pillages.

Delphes, situé au pied du mont
Parnasse, en Phocide, était le lieu où parlait
l'oracle d'Apollon à travers sa prophétesse, la Pythie
qui était assise dans une salle du temple d’Apollon
et parlait au nom du dieu.

Elle répondait aux questions
qui lui étaient posées ; ces réponses étaient
aussitôt traduites en phrases par des prêtres.

Investie d'une signification sacrée,
le sanctuaire est, du vie au IVe siècle av. J.-C.,
le véritable centre et le symbole de l'unité du monde
grec.

Les sanctuaires panhelléniques
sont des complexes architecturaux extérieurs aux
cités. Ils constituent les seuls lieux où tous les
anciens Grecs, et certains barbares (Lydiens et Étrusques)
prennent part à des célébrations religieuses
communes.

Le philosophe péripatéticien
Phanias d'Érèse dit qu'avant le règne
du roi Gygès de Lydie, Apollon Pythien n'avait ni or, ni
argent. Sur le site du sanctuaire, un village modeste fondé
vers 1400 av. J.-C. existait : nommé Pythô, il est
abandonné entre 1100 av. J.-C. environ et 800 av. J.-C.

Le sanctuaire se développe probablement
à partir de cette date, avec l’apparition d’un
premier autel et d'un premier temple, que la tradition delphique
et la tradition antique placent sur une pente ; la fissure
naturelle et les exhalaisons de vapeurs sur ce site « sont
du domaine de la légende» et leur mention date d’une
époque tardive.

Il est sûr qu’aux VIe et
Ve siècles av. J.-C., aux siècles de l’apogée
delphique, rien de tel ne s’est jamais produit, et les études
modernes de géomorphologie ont d’ailleurs démontré
l’impossibilité de vapeurs dans le téménos
du temple.

C'est surtout entre le milieu
du VIIIe siècle av. J.-C. et le milieu du VIIe siècle
av. J.-C., qu'Apollon Pythien gagne une notoriété
importante : il est le protecteur des entreprises coloniales
effectuées durant cette période.

Le tremblement de terre de
373 av. J.-C., suivi de chutes de rochers du haut des Phédriades,
causa la destruction du temple d’Apollon qui fut reconstruit
en 370-330 av. J.-C. grâce à une collecte panhellénique
: ce sont les ruines de ce temple inauguré en 330 qui subsistent
actuellement sur le site.

Perdant son importance politique et
surtout son autonomie à partir du IVe siècle
av. J.-C., le site entame un long déclin, marqué
par les troubles politiques qui agitent la Grèce.

Le IIIe siècle av. J.-C. est
celui de la mainmise de la Confédération étolienne,
dont les troupes repoussent près de Delphes les envahisseurs
Galates en 279 av. J.-C.

Après la conquête
de la Grèce par Rome (le pilier de Paul-Émile
commémore la défaite du dernier roi macédonien
Persée), peu d'édifices importants sont construits,
si ce n'est le stade refait par Hérode Atticus.

En 392, l'interdiction des
cultes païens dans l'empire romain par l'Édit de Théodose
marque la fin officielle du culte d'Apollon Pythien. Une
ville chrétienne s'installe alors dans le sanctuaire (églises,
villas importantes), puis disparaît probablement au VIIe ou
VIIIe siècle.

Le site est provisoirement
abandonné et les ruines sont progressivement recouvertes.
Le site est ensuite occupé jusqu'à la fin du XIXe
siècle par un village du nom de Kastri. Cyriaque
d'Ancône fut le premier à identifier, visiter et décrire
le site de l'antique Delphes, en 1436, sur la base de l'étude
des textes de Pausanias.

Les oracles delphiques sont surtout
connus par l’Histoire d’Hérodote ainsi
que par des inscriptions. Certaines réponses étaient
rédigées en hexamètres dactyliques
et exprimaient un sens obscur et ambigu, comme l’indique le
nom du dieu, Apollon Loxias.

Animé du désir
de détruire le royaume de Cyrus, le roi Crésus consulta
à plusieurs reprises l’oracle de Delphes ;
la Pythie lui répondit : « Si Crésus
franchit le fleuve Halys, il détruira un grand empire»
; à la troisième consultation, voulant savoir si sa
monarchie serait de longue durée, elle lui répondit
: « Quand un mulet sera roi des Mèdes, alors,
Lydien aux pieds délicats, fuis le long de l’Hermos
caillouteux, ne reste pas en place et n'aie pas honte d’être
lâche. »

En 480 av. J.-C., malgré
le sacrifice héroïque des 300 Lacédémoniens
aux Thermopyles, Xerxès envahit la Grèce ;
les Athéniens vont consulter dans l’épouvante
l’oracle de Delphes, et la Pythie leur annonce que
rien ne peut plus entraver « l’irrésistible élan
d’Arès monté sur le char syrien »...

Mais peu après elle
leur prédit leur salut et celui de leurs enfants derrière
« une muraille de bois qui seule ne pourra être prise
ni détruite. » Les textes littéraires
nous ont également conservé un oracle rendu à
Oribase, envoyé de l’empereur romain Julien à
Delphes.



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