Etape
59 - Retour par le Grand Canal - Toutes les stations du Vaporetto
Lundi 30 octobre 2023. Au cours
des mille cent ans d'existence de l'institution ducale à
Venise, se sont succédées une série de 120
doges, avec une énorme variété de personnalités
et de caractères, beaucoup se sont limités
à servir rigoureusement et fidèlement la République,
d'autres ont tenté de la renverser, d'autres encore le sont
progressivement devenus grands ou l'ont accompagné dans son
lent déclin.

Le poste de doge était convoité
pour la valeur symbolique qu'il donnait aux familles aristocratiques.

Le faste qui entouraient les cérémonies
des doges rendait la fonction convoitée par tous
ceux qui aspiraient à être autre chose que de simples
nobles.

Mais les doges eux-mêmes devaient
contribuer fortement à leur entretien, et c'était
donc une prérogative très coûteuse pour un aristocratie
riche (il y avait en fait aussi une aristocratie pauvre et une très
pauvre).

Selon les époques et les situations,
le doge faisait office de chef ou de notaire suprême.

Ainsi, en laissant de côté
la grande variété de situations, on peut seulement
dire que toujours dans l'ordre politique il y avait une série
de dispositions qui limitaient fortement les prérogatives
du doge et même sa propre vie quotidienne : la fonction
du doge était principalement celle de représentant
officiel de Venise dans les cérémonies publiques et
dans les relations diplomatiques avec d'autres États et de
montrer sa royauté même sans régner.

Le seul pouvoir efficace qui n'a jamais
été retiré au Doge était celui de pouvoir
commander la flotte et diriger l'armée en temps de guerre.

Pour le reste, il se bornait
à siéger à la tête de la Sérénissime
Signoria et à présider avec elle tous les conseils
de la République, où cependant son vote n'avait
pas plus de valeur que celui de n'importe quel autre membre.

Le Doge était constamment surveillé
et contrôlé dans son travail par les conseillers ducaux
et par les autres magistratures désignées à
cet effet.

Il ne pouvait pas se mêler à
la population, il n'avait pas de gardes du corps ; il ne
pouvait pas placer sa résidence en dehors du Palais Ducal,
où il ne pouvait pas non plus exposer son arme,
à l'exception d'un bouclier dans la salle du même nom
qui formait le plus grand appartement ducal.

Tous les cadeaux qu'il recevait des
dignitaires en visite allaient au Trésor de Saint-Marc
ou au trésor public.

Il ne pouvait accorder d'audience
ni de correspondance ouverte qu'en présence des conseillers
ducaux.

Une grande partie des dépenses
nécessaires au maintien de la charge lui incombaient personnellement,
pesant ainsi sur son patrimoine, de sorte que les élections
mettaient souvent les familles d'origine dans de graves difficultés
économiques.

Les funérailles du doge pouvaient
avoir lieu solennellement ou en privé. Toute la noblesse
vénitienne vêtue de deuil pour la mort du Doge, à
l'exception de vingt patriciens qui portaient la robe écarlate
pendant toute la période de l'interrègne,
étaient choisis par la Signoria parmi les plus éminents
pour la représenter pendant les trois jours des funérailles
et en la procession solennelle.

En fait, c'était le signal
qu'ils voulaient donner au monde et que donc malgré
le Ducatu vacant, les conseillers ducaux et les chefs de la Quarantia
al Criminal présidaient la République et le gouvernement
de l'État.

Dans la basilique Saint-Marc,
le doge nouvellement élu était présenté
au peuple en liesse et après sa mort, il était porté
devant l'entrée principale de l'église.

Avec l'arrivée à
Venise en 828 des restes de l'évangéliste Marc et
la construction par le doge de l'époque de la basilique Saint-Marc,
de la chapelle palatine et de l'église d'État,
le doge devint pratiquement le chef de l'Église de San Marco.

Clément V lui-même reconnaissait
les prérogatives du doge, parmi lesquelles celles
qui limitaient le pouvoir pontifical dans la nomination des évêques.

La question de la double nature du
pouvoir ducal fut également discutée lors
du Concile de Trente de 1545-1563, au cours duquel, reconnaissant
que le Doge représentait l'Église, mais n'était
ni un véritable évêque ni seulement un prince,
des changements durent être apportés pour comprendre
le Doge de Venise aux côtés des évêques
et des princes.

C'est précisément à
cause de ces caractéristiques et de cette indépendance
du pouvoir spirituel qu'il y eut des tensions continues
avec l'évêque de Rome.

Mais c'est cette même indépendance
religieuse de Venise et de la République qui a permis
à ceux qui étaient persécutés pour leurs
idées hétérodoxes d'y trouver refuge, comme
Giordano Bruno ou comme Galilée.

Certains doges originaux sont également
devenus des saints. Cette indépendance religieuse
fut détruite par la conquête napoléonienne et
par la décision de supprimer l'ancienne autonomie de la Chapelle
Ducale.










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