Etape 92 - Potosi
- Au pied de la mine du Cerro Rico
Jeudi 27 juin 2019.
Aujourd'hui, je ne me doute pas que je vais vivre une des
plus dures journées de toute mon existence en plongeant dans
les entrailles de la terre et du Cerro Rico pour visiter la célèbre
mine d'argent de Potosi. Une véritable épreuve
physique à laquelle je ne m'étais pas du tout préparé.
Mais j'y reviendrai plus tard. Je veux d'abord profiter de ce moment
pour raconter comment et dans quelles circonstances fut
découverte puis exploitée la fameuse mine de Potosi.

C'est Hualipa, un indien de
l'Altiplano, qui en 1545, fit tout à fait par hasard, la
découverte du Cerro Rico. Selon la légende, c'est
en cherchant un lama égaré dans une grotte que cet
Indien découvrit les richesses minérales du Cerro
Rico. Frigorifié, il alluma un feu qui fit briller
sur les parois de la grotte des reflets d'argent...

Nous nous préparons à
descendre dans la mine. Mais pour cela, nous devons nous
équiper, avec casques et bottes imperméables.
Jusque là, je ne me doute de rien...

Avant de descendre dans a mine, nous
nous arrêtons dans une rue voisine de la mine pour
acheter alcool et feuilles de coca que nous offrirons aux mineurs
qui travaillent dans les boyaux de la mine. La mine justement.
Hualipa ne se doutait pas de toute la misère qu'il
allait provoquer pour tout son peuple en en faisant la découverte,
mine si fabuleuse que Charles Quint, dix ans plus tard, alors le
maître de l'Europe, éleva Potosi au rang de ville impériale
(la seule d'Amérique latine à posséder ce titre).

Il lui donna aussi pour devise : "je
suis la riche Potosi, le trésor du monde, la reine des montagnes
et la convoitise des rois"...

Au final, la mine de Potosi fut
exploitée pendant trois siècles par les Espagnols.
Il y eut jusqu'à 10.000 galeries creusées dans la
mine et plusieurs milliers d'entrées.

La première découverte
de cet important patrimoine ne remonterait cependant pas
à Hualipa, mais au tout début du XVIe siècle
: on connaissait déjà son existence
au temps de l'Inca Huayna Capac. Les hommes de l'Inca ne l'auraient
alors pas exploité, une voix étrange les ayant mis
en garde : "Ceci n'est pas pour vous. Ces
richesses, Dieu les réserve à ceux qui viennent de
plus loin..." Il ne croyait pas si bien dire !

Au milieu du XVIIe siècle, avec
165.000 habitants (d'autres sources parlent de 200.000), Potosi
était aussi peuplée que Paris et Londres. La ville
se couvrit alors de superbes édifices coloniaux et d'églises.

La richesse de la montagne d'argent
était si fabuleuse que des historiens assurent le
flux d'argent des mines d'argent de Potosi vers l'Europe fut l'une
des conditions du développement du capitalisme, au même
titre que le commerce triangulaire que l'exploitation de
la mine favorisa.

Au final, l'Espagne roula sur
l'argent... s'endetta et gaspilla tellement l'argent de Potosi et
celui extrait au Mexique que les vrais bénéficiaires
furent les banques des pays du nord de l'Europe, de France
également. Ce processus de formation du capital, une
injection de liquidité qu'on a du mal à imaginer (l'équivalent
de 50 milliards de dollars du XVe au XIXe siècle) équivaut
largement à plusieurs plans Marshall de l'après Seconde
Guerre mondiale... Et autant de richesses qui échappèrent
à la Bolivie.



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