Etape
72 - Sainte-Chapelle - Le décor somptueux de la chapelle
haute
Jeudi 14 mars 2019. Le décor
peint des supports est plus complexe qu'au rez-de-chaussée,
et date en grande partie d'origine. Les Apôtres qui font partie
intégrante du programme symbolique ne le sont plus : les
six statues d'origine qui avaient retrouvé leur place après
leur restauration au milieu du xixe siècle ont rejoint les
autres au musée de Cluny.
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Les experts
ont longtemps débattu si les Apôtres
ne sont pas un peu postérieurs à la chapelle,
et leur style perçu comme « moderne » par
les révolutionnaires les aurait sauvés, mais
quelques-uns ont indéniablement la facture des années
1240. |
Les tentures
peintes sous les arcatures plaquées ont été
imaginées par Lassus, et les médaillons sur le thème
du martyre ont été restaurés, et en
partie entièrement refaits.

Les arcatures sont plus élaborées
que dans la chapelle basse, et reprennent le motif du réseau
secondaire des fenêtres latérales de la chapelle haute.

Une frise de feuillages court
en dessous du seuil des fenêtres, et des cordons de feuillages
surmontent les arcades. Les écoinçons sont
garnis de bustes d'anges en haut-relief.

La superficie vitrée
de la chapelle haute porte sur 615 m2 environ sans la rosace. Tous
les vitraux étaient en place dès l'origine, mais un
nombre important a été refait au milieu du XIXe siècle,
sans altérer le rendu général et dans le parfait
respect de l'iconographie et du style d'origine.

Le XIIIe siècle connaissait
deux types de vitraux : ceux destinés aux fenêtres
hautes, au transept et à l'abside, qui étaient conçus
pour être vues de loin et transmettaient des messages symboliques
souvent axés sur le pouvoir royal ou ecclésiastique,
et ceux destinés aux collatéraux, qui étaient
conçus pour être contemplés de près
et comportent des cycles narratifs, avec une iconographie
très proche des enluminures.

Puisque la Sainte-Chapelle
n'a pas de collatéraux, les fenêtres descendent assez
bas, et le spectateur est très proche des registres inférieur
des vitraux, ce qui a motivé le choix du type de
vitraux habituellement propres aux collatéraux.

Les fenêtres latérales
atteignent près de quinze mètres de hauteur, et
la lecture des registres moyens et supérieurs en devient
très malaisée en raison de l'éloignement et
de l'effort de concentration que demande le déchiffrage de
ces miniatures. Leur nombre élevé met bien
en relief leur petite dimension : l'on ne compte pas moins de mille
cent treize scènes.

La Sainte-Chapelle est restée
le seul édifice religieux où ce type de vitraux
a été généralisé. Il
a été introduit partiellement dans les fenêtres
hautes de la cathédrale de Clermont-Ferrand et de Tours,
mais ces essais sont restés sans lendemain. Indépendamment
de leur signification, les dominantes rouge et bleue des
vitraux donnent à la chapelle son éclat, et la polychromie
architecturale est centrée sur ces mêmes couleurs.

La lecture se fait de la gauche à
la droite, et du bas vers le haut, ligne par ligne. Il n'y
a pas d'enchevêtrement de scènes, mais le dessin des
ferrures délimitant les panneaux met certains panneaux en
avant au détriment des autres, et le visiteur peut
en déduire un rapport hiérarchique qui, en réalité,
n'existe pas.

Toutes les statues portent
une croix de consécration et ont donc dû exister en
1248, mais elles sont peut-être l'œuvre de deux
artistes différents.

Les écoinçons
sont garnis de bustes d'anges en haut-relief. Un décor exubérant
existe également au revers de la façade occidentale,
où une coursière protégée par une balustrade
relie les deux tourelles d'escalier, au pied de la grande
rosace flamboyante de 9,00 mètres de diamètre.

Les tympans de ces trois arcades
ont été peints par Steinheil, qui n'a pu
s'appuyer sur rien d'existant, car la présence de la tribune
d'orgue avait fait que ce mur fût resté vierge.

Les motifs sont les trois scènes
de sacrifice de l'Ancien Testament.
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Un Christ
bénissant flanqué d'anges en prière
et encadré des prophètes Isaïe et Jérémie
; puis les trois figures du sacrifice de la croix
: l'immolation de l'agneau pascal ; le sang sur les maisons
des Hébreux (afin que l'ange de la mort épargne
les premiers-nés) ; et le serpent d'airain de Moïse
dans le désert. |
Le dallage
du sol a été conçu par Lassus d'après
des dessins de Steinheil, mais réalisé par Bœswillwald.
Il consiste de pierre dure gravée en creux, où
ont été incrustés des mastics de couleurs variés.

Dans la nef, des rinceaux encadrent
des oiseaux, des quadrupèdes et des emblèmes héraldiques,
et dans l'abside, ont été représentées
les quatre fleuves du paradis comme symbole de la grâce divine,
ainsi que les sept sacrements qui jaillissent comme des sources
d'un rocher.

Concernant les six anges sur
les écoinçons des arcades qui la supportent, ils ne
figurent pas sur les représentations anciennes,
et l'on n'est pas certain s'ils correspondent à des vestiges
lapidaires retrouvés, où s'ils sont une fantaisie
des restaurateurs.

La raréfaction des crédits
à partir de 1850 a empêché la réalisation
de la grille de clôture, du maître-autel et de la grande
châsse.

Ainsi, le baldaquin, symbole
du pouvoir royal, n'a jamais retrouvé sa fonction,
et le programme symbolique de la décoration, dont
font partie les vitraux, les Apôtres et les scènes
de martyres des médaillons, reste incomplet sans les bas-reliefs
de la grande châsse : avec les scènes de la
Crucifixion, de la Flagellation et de la Résurrection du
Christ, ils marquaient son aboutissement.

Les baies de l'abside sont
différents, et présentent deux lancettes aux têtes
trilobées non inscrites, surmontées de trois trèfles.
— Les voûtains sont peints en bleu et rehaussés
de petites étoiles d'or, et non de fleurs de lys comme au
rez-de-chausée.
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Le profil
des ogives et doubleaux est analogue à la chapelle
basse, et ils retombent sur des colonnettes de deux
diamètres différents, un peu plus forts pour
les doubleaux. |
En comptant
les colonnettes des formerets et des fenêtres, l'on relève
quatre diamètres différents. Cet ajustement au strict
nécessaire est caractéristique de la virtuosité
de la période rayonnante, et permet globalement de réduire
l'envergure des supports.

Les chapiteaux des ogives et doubleaux
sont disposés à bec, et ceux des ogives sont
placés de biais afin de s'orienter directement vers les ogives,
disposition qui est connue dès la fin de la période
romane.






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