Etape
61 - Musée du Louvre - Les collections d'Europe du Nord (suite
II)
Jeudi 14 mars 2019. Je poursuis
ma visite des collections d'Europe du Nord par les oeuvres de Frans
II Pourbus et par son incontournable portrait de
Marie de Medicis. Ce majestueux portrait, exécuté
sans doute vers 1609-1610, est considéré comme le
seul témoignage du décor composé de vingt-huit
portraits de rois et de reines de France commandé à
Jacob Bunel et François Pourbus pour la Petite Galerie du
Louvre, décor malheureusement détruit par un incendie
en 1661. Marie de Médicis, reine de France et épouse
d'Henri IV, parée de bijoux somptueux pose avec solennité
dans ses habits de couronnement.
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Cet exemple,
très représentatif du portrait de parade
dans la tradition italo-espagnole du XVIe siècle,
use de la mise en scène conventionnelle qui l’accompagne
d’ordinaire, à savoir, les lourdes draperies
d’honneur, les colonnes et un dallage palatial en marbre.
Le genre de ce portrait, très officiel, est en outre
déterminé par le personnage représenté
et, autant par les dimensions elles-mêmes que par le
traitement, on peut y voir clairement l’affirmation
d’une puissance et d’un pouvoir affichés.
Le costume cérémonieux, l’incomparable
richesse des joyaux, la pose académique et la position
des mains, parlent ici d’eux-mêmes. Pourbus
s'est justement attaché à soigner cette théâtralité
tout en gardant une dimension humaine au personnage. |
Après
quoi, je reste subjugué par ce nouveau tableau de Jan
Brueghel l'Ancien : La vierge, l'enfant Jésus
et les anges au milieu d'une guirlande de fleur. Tableau
transposé sur toile vers 1925. Médaillon religieux
dû à Rubens. L'association entre les deux peintres,
d'un type très usuel où le symbolisme floral s'associe
à un tel sujet de piété, est forcément
voulue dès le départ. À dater, vu
le style de Rubens, vers 1616-1617.
Direction
maintenant la peinture de genre et ce magnifique
tableau de Dirck Hals, Réunion Galante. Cette
oeuvre a été récupérée à
la fin de la Seconde Guerre mondiale, en attente de sa restitution
à ses légitimes propriétaires.

C'est Frans Hals, son frère
plus âgé d'une dizaine d'années, inscrit
dans la guilde de Saint-Luc de Haarlem dès 1610, qui
donne à Dirck ses premières leçons de peinture.

Dirck Hals passe la plus grande partie
de sa vie dans sa ville natale. Au début de sa carrière,
son parcours est presque identique à celui de son frère
aîné : de 1618 à 1624, il sert dans la deuxième
compagnie de la milice de Saint-Georges, dont Frans Hals faisait
partie depuis 1612 et, durant la même période à
peu près, de 1618 à 1626, il est membre de
la chambre de rhétorique De Wijngaertranken (« Les
Sarments de vigne »), que Frans Hals avait lui aussi fréquentée.

Frère cadet de Frans Hals,
il a surtout réalisé des scènes de genre.

Je poursuis ma visite par l'oeuvre
de Frans II Francken, le Destin de Balthazar, peint vers
1633.

A gauche, Balthasar assis sous
un dais écarlate préside au festin. Au centre,
la vaisselle sacrée volée au Temple est amoncelée
en pyramide sur un piédestal. Sous elle, la reine,
vêtue de rouge comme Balthasar, se fait verser du vin. A droite,
au premier plan, les valets s’occupent du vin et des plats.
En haut au fond l’inscription n’est guère visible.
Le personnage assis sur un tabouret entre Balthasar et la reine
pourrait être Daniel : sa main gauche est posée
contre sa cuisse et non sur la table ; ce n’est pas un convive
; il vient d’être mandé par le roi.

La représentation fastueuse
du banquet tend à éclipser la signification
biblique de l’image. Pourtant, malgré l’abondance
de personnages, l’image est sans profondeur, à la manière
des enluminures médiévales : presque toutes
les têtes sont à la même hauteur, pour signifier
l’égalité des commensaux dans le festin. Ce
n’est donc pas la perspective qui ordonne et régule
le dispositif de l’image.

Immédiatement à côté
de ce tableau, voici ce Portrait d'une femme âgée
de 44 ans, dont l'auteur est resté anonyme.
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Cette oeuvre
magnifique, sans doute peinte en Hollande au milieu
du XVIe siècle, a elle aussi été récupérée
à la fin de la Seconde Guerre mondiale et
confiée au Louvre. |
Hélas,
l'auteur de ce magnifique portrait demeure inconnu. On y voit
une femme assise, à mi-corps, de trois-quarts, reconnaisable
à sa coiffe et tenant dans les mains son chapelet.

A suivre, cette oeuvre poignante d'Otto
Van Veen, L'Artiste peignant entouré des siens,
datant de 1629.

Tableau exceptionnel dans l'œuvre
de l'artiste qui peignit encore cette toile à Leyde,
avant son départ pour Anvers.

Sur le cartouche, à droite,
armoiries des parents du peintre et liste numérotée
des prénoms des 19 membres de la famille.

Ses œuvres témoignent de
l’érudition humaniste d’Otto Venius et
reflètent bien son art à la fois archaïque, par
la manière dont il inscrit les scènes dans le paysage,
et novateur dans le traitement des figures.

L’œuvre d’Otto Van
Veen est riche par ses compositions constituées de tableaux
d’autel, de peintures d’Histoire, d’allégories
et de gravures dont il est connu pour être talentueux.
Les compositions allégoriques étaient par ailleurs
accompagnées de légendes latines dans le but d’en
souligner le sens.

Vient ensuite ce superbe Portrait
présumé de Claes Jobsz. Coster (1581 - 1605), par
Pieter Pietersz.
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Fils d'un
marchand d'Amsterdam peint à l'âge de 17 ans.
Le modèle passait auparavant pour être
Willem Roels. |
Portrait
dans la manière réaliste, franche et savoureuse,
issue d'Aertsen dont Pieter était le fils.

Pieter Lastman fait partie d'un
groupe d'artistes que l'on nomme les pré-rembranesques, c'est-à-dire
les peintres avant Rembrandt, de sensibilité proche des débuts
du maître.

Et encore une autre oeuvre de Jan
Brueghel l'Ancien, le Temple de la Sybile à Tivoli,
peint autour de 1610.

Beau-père de David Teniers le
Jeune, Jan Brueghel a eu des élèves tels que Abraham
Govaerts et Daniel Seghers. On lui doit de nombreux tableaux
de fleurs, genre dans lequel il excellait, ainsi que des compositions
bibliques, des allégories, des scènes mythologiques,
des paysages et plusieurs tableaux sur le Paradis terrestre, œuvres
souvent peintes sur cuivre.

A ne surtout pas manquer dans cette
petite pièce du Louvre, un petit peu à l'écart,
cette incroyable Tour de Babal, peinte par Lucas Van Valckenborch,
autour de 1594.

Au premier plan, Nimrod, le
roi constructeur de la tour. Sujet d'utopie et de vanité
(orgueil de l'homme et refus de Dieu !) qui a passionné les
artistes des XVIe et XVIIe siècles.

Lucas lui-même en a peint au
moins une demi-douzaine (Munich, Coblence, Mayence, etc.)
sous l'influence déterminante de Pieter I Bruegel (voir la
version de Vienne, datée 1563 et celle de Rotterdam, peinte
vers 1568).

Enfin, voici la Sibylle de
Delphes, de Ludger Tom Ring l'Ancien, peint vers 1538.
Il fait partie d'une série de quinze tableaux représentant
des Sibylles et des Prophètes païens annonçant
la venue du Christ, qui décoraient le choeur de la cathédrale
de Münster (quelques-uns sont au musée de Münster).
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Selon une hypothèse
récente, ces tableaux seraient des copies réalisées
par Ludger tom Ring d'après une première série
peinte par Robert Campin en 1435 et endommagée lors
des désordres anabaptistes de 1534. Il existe
une deuxième série répétée
vers 1570, avec quelques variantes, par Hermann tom
Ring (1521 - 1596), le fils de Ludger (également
au musée de Münster). |


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