Etape 40 - Paris - Au pied de l'église Sainte-Madeleine
Mercredi 5 décembre 2018.
Petite journée hivernale comme j'aime aujourd'hui. Cette
petite escapade parisienne va me permettre de faire un petit tour
par l'église Sainte-Madeleine***, une des
églises préférées des parisiens. Cet
édifice constitue une parfaite illustration du style
architectural néoclassique avec son portique octostyle.
Pour faire plus clair, avec ses huit colonnes qui rappellent
les frontons des temples romains.

Sa construction s'est étalée sur 85 ans en raison des troubles politiques en France à la fin du XVIIIe siècle, et au début du XIXe siècle. Les changements politiques de l'époque en firent modifier à plusieurs reprises la destination et les plans. Conçu par Napoléon Ier comme un temple grec dédié à la gloire de sa Grande Armée en 1806, le bâtiment faillit être transformé en 1837 en gare ferroviaire, la première de Paris, avant de devenir une église en 1845. Sous le fronton, l'inscription en latin « D.O.M. SVB. INVOCAT S. MAR. MAGDALENÆ » signifie « Au Dieu tout puissant et très grand, sous l'invocation de sainte Marie-Madeleine ». L'édifice a une longueur de 108 mètres, une largeur de 43 mètres, une hauteur de 30 mètres et est ceinturé par 52 colonnes corinthiennes.

Le fronton, œuvre du sculpteur Philippe Joseph Henri Lemaire, représentant : Le Jugement dernier , fut réalisé en 1833. La loi de 1834 dégageant un crédit de 6 millions pour des chantiers d'utilité publique afin de résorber le chômage permit d'achever les travaux en 1842. L'église fut consacrée le 9 octobre 1845 par Mgr Affre, archevêque de Paris.

Hélas, la pollution tant extérieure qu’intérieure a recouvert les magnifiques statues, décors sculptés et peintures d’une couche de poussière noirâtre et grasse. Les nombreuses œuvres romantiques — réalisées par plus de 60 sculpteurs, peintres, mosaïstes, fondeurs et orfèvres parmi les plus renommés du xixe siècle — ne livrent plus qu’un triste rayonnement. Dommage. Toutefois, un vaste projet de restauration de l'édifice devrait voir le jour avant la fin de la décennie.

A l'intérieur, c'est une toute autre histoire. L'église Sante-Madeleine est un pur bijour du néoclassicisme français du XIXe siècle. La décoration intérieure fut conçue par Huvé, après la révolution de 1830, en s'inspirant du volume du frigidarium des thermes antiques (les thermes de Caracalla venant d'être relevés en 1826), et de la décoration polychrome du Panthéon de Rome.

Sous tutelle d'une commission composée du directeur des Travaux de Paris, d'académiciens et de hauts-fonctionnaires, Huvé se voyait assez limité dans sa marge de manœuvre. Il déplora notamment le choix fait par la commission de remplir les 6 lunettes de la nef, destinées à apporter la lumière nécessaire, pour les remplacer par des jours percés dans les 3 coupoles. Il a laissé des dessins de l'église, dans cette première idée, où la lumière baigne l'intérieur et magnifie sa décoration de marbres polychromes.

Huvé eut à achever ce qui fut en son temps le plus important chantier d'architecture religieuse, mobilisant quantité d'artistes de l'époque, et faisant de l'édifice l'un des plus grands chantiers romantiques. Y travaillèrent notamment les peintres Abel de Pujol, François Bouchot, Léon Cogniet, Auguste Couder, Paul Delaroche, Victor Schnetz, Emile Signol, Jules-Claude Ziegler, les sculpteurs Antoine Étex, Pierre-Joseph Lemaire, Carlo Marochetti, James Pradier, Henry de Triqueti, etc.

Mais diable que l'histoire de la construction de l'église Sainte-Madeleine fut compliquée. Une chapelle fut élevée ici en 1238, puis remplacée par une nouvelle chapelle dédiée à sainte Marie-Madeleine, sainte Marthe et saint Lazare, dont le roi Charles VIII posa la première pierre en 1492. Devant l'accroissement de la population du faubourg de la Ville l'Évêque, la chapelle devint église paroissiale en 1639 et fut reconstruite puis agrandie, en 1659 et 1698. En 1722, il devint nécessaire d'envisager la construction d'une nouvelle église sur un nouveau site. On décida de la construire sur la nouvelle place Louis XV, à l'extrémité de la future rue Royale. L'ancienne église fut désaffectée en 1765, vendue en 1767 et démolie en 1801.

Les plans de la nouvelle église de la Madeleine furent commandés en 1757 à Pierre Contant d'Ivry, architecte du duc d'Orléans. Il proposa un édifice en forme de croix latine surmonté par un petit dôme dont le projet fut approuvé formellement en 1764.

La première pierre avait été posée par le roi Louis XV en personne, le 3 août 1763. Les fondations étaient creusées et le soubassement commençait à s'élever lorsque Pierre Contant d'Ivry mourut en 1777. Celui-ci fut remplacé par un de ses élèves Guillaume-Martin Couture dit « le Jeune », qui remania complètement le projet et proposa une église en forme de croix grecque, surmontée d'un dôme plus vaste, et précédée d'un portique péristyle d'ordre corinthien.

Lorsqu'éclata la Révolution française, les fûts des colonnes de la Madeleine s'élevaient jusqu'à la hauteur des chapiteaux. Mais la période était peu propice à la construction d'églises, et les travaux furent complètement arrêtés sur décret de l'Assemblée nationale, le 30 décembre 1791. La direction des Bâtiments loua alors les sous-sols à un marchand de vin (1794) et diverses parcelles de l'enclos à des artisans. Sous le Consulat (1799-1804), les travaux restèrent en suspens.

De nombreux architectes avaient proposé des projets pour l'achèvement de l'édifice. Un décret impérial du 21 février 1806 affecta l'ensemble immobilier à la Banque de France, au Tribunal de commerce et à la Bourse de Paris. Mais le projet fut abandonné sur les instances des banquiers et des commerçants, qui jugeaient l'emplacement trop éloigné du quartier des affaires. En définitive, le 2 décembre 1806, Napoléon Ier signait un décret pour l'édification d'un temple à la gloire des Armées françaises. Il devait s'agir d'un temple périptère, retour à l'antiquité, inspiré de l'architecture gréco-romaine. La Madeleine est quasiment, pour ce qui est de l'aspect extérieur, une restitution de l'Olympieion à Athènes, les colonnes de la Madeleine étant légèrement plus hautes.

On démolit donc tout ce qui avait été édifié et les travaux progressèrent rapidement jusqu'en 1811, date à laquelle ils durent être arrêtés faute d'argent. Après la campagne de Russie de 1812, Napoléon renonça au temple de la Gloire, et revint au projet primitif d'une église.

Finalement, lorsque les Bourbons retrouvèrent leur trône, les travaux étaient bien avancés : les fondations étaient terminées, le soubassement avait été mis en place, les colonnes dressées et les murs latéraux commençaient à s'élever ; il restait à couvrir l'édifice et à le décorer. Le roi Louis XVIII avait ordonné en août 1816 que la nouvelle église serait un monument expiatoire à la mémoire de Louis XVI, de la reine Marie-Antoinette et de Madame Élisabeth. Cette vocation ne devait se traduire que dans le décor de l'édifice et n'altéra donc pas le plan d'ensemble. Mais les fonds manquaient, et Louis XVIII finit par faire édifier à proximité, sur sa cassette personnelle, la chapelle expiatoire.



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