Etape
58 - Musée du Louvre - Le génie créatif de
Pierre Paul Rubens
Mercredi 3 avril 2019. Avant de
quitter le Louvre aujourd'hui, je m'attarde un dernier moment
devant quelques oeuvres de Rubens. A commencer par Clélie
passant le Tibre, de Pierre Paul Rubens (1635).

Captive des Étrusques,
elle s'enfuit à cheval avec ses compagnes pour regagner Rome
(sujet de l'histoire de Rome, tiré de Tite Live). Tableau
transposé de bois sur toile avant 1795 et légèrement
coupé à gauche. À dater des dernières
années de l'artiste.

Un tableau d'atelier (musée
de Dresde) reprend en plus grand cette composition. L'ancienne
attribution à Diepenbeeck est infondée. La récente
restauration (1989 - 1993) permet une attribution à Rubens
même, sans exclure une possible participation de l'atelier
(Jan van den Hoecke ?).

Fille d'un patricien de Rome
Clélie s'échappe de sa servitude auprès du
roi étrusque Lars Porsenna, suivie de ses compagnes, en franchissant
à la nage le Tibre, pour regagner Rome.

Loth et sa famille quittant
Sodome, conduit par les anges, ou La Fuite de Loth (1625), de Pierre
Paul Rubens.

Un des très rares tableaux de
Rubens signés et datés. La femme de Loth,
contrevenant à un ordre divin et regardant en arrière
va être changée, selon la Bible, en statue de sel.
Au-dessus, des êtres en forme de démon (la Bible ne
précise rien de tel), agents de la colère de Dieu,
vont détruire la cité impie de Sodome.

Bel exemple de la dynamique
baroque sculpturale et colorée, chère à Rubens.
Copie par Delacroix au Louvre (salles du XIXe siècle). Peut-être
donné par Rubens au cardinal de Richelieu.

Un de mes tableaux préférés
de Rubens, qui renvoie à l'oeuvre d'un Bruegel
: La Kermesse ou Noces de Village (1635-1638).
La composition montre une kermesse ou une noce de village
affichant un repas champêtre, avec des paysans, dansant ou
mangeant, avec des petites scènes de galanterie, de grivoiserie,
de beuverie, près d'une auberge avec au loin à droite
une colline.

Cette oeuvre se situe dans la production
tardive de l'artiste, vers 1635-1638, et est d'une inspiration manifestement
néo-bruegélienne. Le cochon au premier plan,
à droite, est un vieux symbole de la gourmandise (gula).
Selon certains qui le datent des années 1620, le paysage
serait antérieur aux figures, lesquelles témoignent
du meilleur style tardif et lyrique de Rubens.

Ce panneau monumental, également
appelé Noces de village, s'inscrit dans la tradition
nordique des représentations de fêtes villageoises.
Depuis leur invention par Pierre Bruegel l'Ancien, elles connurent
un très grand succès qui contribua à la renommée
de l'école flamande. Ces compositions avaient bien
souvent une intention moralisante : dénoncer les
bassesses du genre humain en le montrant dans tous ses excès.
Même si l'on devine dans ce tableau, dans
la cahute du premier plan, un groin de cochon, symbole de gourmandise,
la dénonciation des vices n'est pas la préoccupation
première de Rubens.

En effet, le sujet est avant tout le
prétexte pour le peintre d'organiser un savant jeu de formes
et de couleurs afin de rendre toute l'exubérance d'une telle
fête où se mêlent gaiement toutes les générations.
Le banquet se déroule devant une ferme peinte en nuances
de bruns, peut-être à l'occasion d'une noce ou bien
de la fin des moissons (des gerbes de blé sont présentes
au premier plan). La composition est basée sur un
triangle dans lequel se presse le tumulte de la foule paysanne qui
s'étire en une farandole endiablée. La succession
des couples de danseurs se déroule en une arabesque qui semble
décomposer un même mouvement.

L'impression de tourbillonnement d'ensemble
est soulignée par une multitude de courbes qui se font écho.
Pour exprimer la joie de vivre et le plaisir des sens, Rubens
nous offre une galerie de personnages d'une variété
étonnante. Il se plait à décrire des paysans
chahutant comme des jeunes chiots, buvant et mangeant parfois à
même le sol, des enfants pendus goulûment aux mamelles
de matrones rubicondes, des couples éphémères
s'abandonnant sans retenue aux jeux de l'amour... Ce bouillonnement
de vie étourdissant contraste avec l'ouverture sur un paysage
paisible, au ciel lumineux et serein, qui a peut-être été
peint antérieurement.

Cette oeuvre, datée
vers 1635-1638, appartient à la dernière période
de l'artiste, alors au faîte de sa gloire et de son talent.
Il rythme sa peinture audacieuse par des touches colorées,
rapides et brillantes, qu'il laisse volontairement visibles.

Le tableau est entré dans les
collections de Louis XIV en 1685. Sa facture virtuose et
le sens de la couleur de l'auteur ont inspiré de nombreux
artistes français, dont le célèbre peintre
de fêtes galantes, Watteau.

Portrait d'Hélène
Fourment au carrosse, suivi de son jeune fils Frans, en page, dit
Hélène Fourent au carrosse (1639), de Pierre Paul
Rubens. La jeune deuxième épouse de Rubens,
sortant de sa palatiale demeure d'Anvers, apparaît en compagnie
de Frans, le fils né en 1633. Elle est en riche habit
noir (pas de deuil !) à la mode espagnole et porte une typique
coiffure à la houppe en vogue alors dans les Pays-Bas et
en Allemagne.
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Le carrosse
à deux chevaux est signe d'harmonie conjugale, le geste
de la main droite d'Hélène indique la modestie.
Sans doute le dernier portrait connu d'Hélène
par Rubens, dans une somptueuse et vivante manière
baroque qui allie charme, tendresse et majesté. |
Portrait
du baron Henri de Vicq (1651), de Pierre Paul Rubens. Le
baron Henri de Vicq (1573 - 1651), seigneur de Meulevelt, était
ambassadeur des archiducs Albert et Isabelle auprès
de Louis XIII.
L'identité
du modèle est assurée par une gravure du tableau
exécutée entre 1651 et 1680. Tableau
généralement daté vers 1625 à
cause d'une tardive tradition peu fondée (portrait
donné à Vicq par Rubens lors de sa venue à
Paris en 1625 pour la mise en place de la galerie Médicis).
Ce portrait - fort vivant - d'un personnage assez en vue a
pu être tout aussi bien peint dès avant 1620.
Pendant féminin au musée de Tel Aviv. |
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Portrait
d'Hélène Fourment, épouse de l'artiste, et
de deux de ses enfants, Clara Johanna et Frans (1636).
Soit la deuxième épouse de Rubens (le peintre, veuf,
s'était remarié en 1630), la petite Clara-Johanna
(née en 1632) et le jeune Frans (né en 1633). Peint
vers 1635 - 1636 vu l'âge de ces derniers.
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Un repentir
fait apparaître les bras d'un 3e enfant du couple
de l'artiste, Isabelle, née en 1635, détail
réapparu sous les derniers glacis apposés sur
la peinture et correspondant à un dessin du Louvre.
Cela montre que Rubens avait projeté d'agrandir au
fur et à mesure un tableau laissé ensuite partiellement
inachevé, d'où une imbattable impression
de sveltesse et de transparence picturale. |
Cet attachant portrait de famille vaut par
sa spontanéité, sa facture d'allure inachevée
et sa sincérité de sentiment. Les enfants
traités au XVIIe sècle comme des adultes en réduction,
se voient accorder ici leur propre valeur. Notez le détail
de l'oiseau : le lien que tenait Clara ne fut jamais peint.

Abraham et Melchisédech
(1621), de Pierre Paul Rubens. Esquisse pour l'un des plafonds
de l'église des jésuites à Anvers, peints en
1620-1621 et détruits dans un incendie en 1718.

L'érection de la Croix
(1610), de Pierre Paul Rubens. Esquisse pour le triptyque
peint en 1609-1610 pour le maître-autel de l'église
Sainte-Walburge à Anvers et conservé à la cathédrale
de cette ville. Ce tableau illustre clairement
l'influence sur Rubens des artistes de la Renaissance italienne
et du baroque tels que Le Caravage, Le Titien et Michel-Ange.
Mais cette œuvre donne surtout à Rubens le statut de
véritable maître de la peinture flamande de son époque.
En outre, le triptyque annonce aussi l'avènement
de la période baroque. La composition de Rubens est
scindée en trois parties bien distinctes. À gauche
sont représentés un groupe de saintes femmes ainsi
que Marie Madeleine renversée en arrière, comme écrasée
par la croix et tenant un enfant dans les bras. Au-dessus se trouvent
saint Jean et la Vierge. Le panneau de droite laisse entrevoir l’armée
romaine avec un officier à sa tête. Enfin, le panneau
central révèle la tension entre la multitude d'hommes
musclés essayant de soulever la croix et le poids apparemment
insupportable du Christ sur la croix.

Philopoemen, général
des Achéens, reconnu par ses hôtes de Mégare
(1610), de Pierre Paul Rubens. Esquisse pour un grand tableau
perdu, peut-être peint en collaboration avec Snyders
et connu par diverses copies (Madrid, Prado ; Philadelphie, etc.).



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