Etape 29 - Noradouz
- A l'ombre de la forêt de khatchkars
Mardi 1er novembre 2023.
Je m'aperçois que je parle de khatchkar depuis un
petit moment et je n'ai toujours pas expliqué ce dont il
s'agissait. Voyons ce qu'en dit notre ai Wikipedia.

Un khatchkar, malgré le fait
que le mot soit imprononçable, est une « stèle
de forme arquée ou rectangulaire sculptée d'une ou
de plusieurs croix accompagnée souvent d'un décor
ornemental, parfois de figures humaines et d'inscriptions.

Spécificité de l'art
arménien, il était autrefois présent
sur tout le territoire de l'Arménie historique et est aujourd'hui
particulièrement préservé en Arménie
et au Haut-Karabagh.

Dressées, encastrées,
rupestres ou en chapelle, ces œuvres, mesurent généralement
d'1,5 à 2 m de hauteur, de 0,5 à 1,5 m de largeur
et de 10 à 30 cm d'épaisseur.

Elles ont une fonction soit
votive, soit commémorative, soit apotropaïque
; elles constituent parfois des « cimetières de khatchkars
», comme à Noradouz ou, avant sa destruction, à
Djoulfa.

Elles incarnent la christologie
de l'Église apostolique arménienne, en ce
qu'elles ne représentent pas la mort du Christ mais sa nature
divine, en un arbre de vie.

L'histoire de l'art des khatchkars
est généralement divisée en quatre périodes
: la période des origines, incertaines, du IVe au
IXe siècle, celle de la création et de la formulation,
du IXe au XIe siècle, celle de l'achèvement et de
la perfection, du XIIe au XIIIe siècle, et enfin la période
finale, du XIVe au XVIe (voire XVIIIe) siècle.

Malgré un renouveau depuis les
années 1960, les khatchkars modernes ne rivalisent
pas avec les khatchkars classiques.

Depuis le 17 novembre 2010,
« L’art des croix de pierre arméniennes. Symbolisme
et savoir-faire des Khachkars » figure sur la liste du patrimoine
culturel immatériel de l'humanité de l'UNESCO.

En arménien, le mot
« xac‘k‘ar » se décompose en «
xac‘ », « croix » , et « k‘ar
», « pierre » .

Le nom signifie donc littéralement
« croix-pierre » et se traduit « croix
sur pierre » ou « pierre à croix » (la
fréquente traduction « croix de pierre » est
en réalité fautive, un khatchkar n'ayant généralement
pas la forme d'une croix).

Les khatchkars sont un type de sculpture
semblant « le plus caractéristique de l'Arménie
», et en tout cas typique de l'art arménien, voire
« une forme cultuelle et artistique propre à l'Arménie».

Les ornements de la stèle, orientée
vers l'est, sont situés sur la face ouest et sculptés
en bas-relief, de manière continue.

La pierre utilisée est en principe
une pierre locale et relativement tendre : tuf, basalte,
andésite, felsite, grès.

La hauteur d'un khatchkar varie en
général entre 1,5 et 2 mètres ; on
relève toutefois des exemplaires pouvant s'élever
à 6 mètres (cas de deux khatchkars de 1194,
Aprank, région d'Erzenka, l'actuelle Erzincan).

La largeur équivaut quant
à elle dans la plupart des cas à environ la moitié
de la hauteur du khatchkar (en moyenne de 0,5 à
1,5 m).

Les khatchkars de Djoulfa (Nakhitchevan)
font cependant exception : leur hauteur équivaut
en général au triple de leur largeur. Enfin,
l'épaisseur de la stèle varie entre 10 et 30 cm.

Deux types particuliers de khatchkars
se distinguent de la norme par leur forme : la forme tewawor
xac‘ : la stèle revêt alors l'apparence d'une
« croix aux bras libres » ; la forme ormnap‘ak
xac‘, « croix sertie de maçonnerie » ou
xac‘k‘aramatu.

Il existe aussi la « chapelle-khatchkar
» : le ou les khatchkars sont encastrés dans
des espèces de petites chapelles.

La symbolique du khatchkar est issue
de l'époque à laquelle il apparaît en Arménie
: le khatchkar est « la quintessence de sa christologie
», dont la définition se stabilise au VIIe siècle
sous le Catholicos Hovhannès III d'Odzoun, « une des
manifestations les plus patentes de la distance qui sépare
l’Arménie des mondes grec et latin ».

La nature divine du Christ est alors
mise en avant, ce qui a pour conséquence la non-représentation
de sa mort.

La croix est un « trait
dominant de la dévotion populaire des Arméniens».

Le juriste Mkhitar Goch en dit
« les Grecs et les Géorgiens honorent davantage les
images, les Arméniens, la croix ».

Elle n'est alors pas « l'instrument
du supplice du Christ […] l'image du bois sur lequel il a
été crucifié », mais «
un arbre de vie, le symbole de la victoire sur la mort ».

En tant que stèle dressée,
« cette construction en verticale symboliserait le
passage du flux vital, souffle de vie… ».

Cette même croix, au niveau central
de la stèle, relie le niveau inférieur («
le monde, la vie de l'homme, le passé et le mal »)
au niveau supérieur (« le ciel, le sacré, le
futur et le bien »), en « médiatrice universelle
entre le croyant et Dieu ».

Par ailleurs, dans la croyance populaire,
un khatchkar contient une parcelle de la Vraie Croix.

Il « illustre le mieux
certains aspects importants de la spécificité arménienne
en matière de mentalité, de position dogmatique et
de création esthétique ».

Enfin, le caractère continu
des ornements du khatchkar crée « une illusion
d'infini qui transmet au signe sacré une visibilité
mystérieuse et une force particulière »

Les premiers khatchkars sont apparus
au IXe siècle, pendant la renaissance arménienne
suivant la libération du joug arabe sous les Bagratides.

Leur origine est située en Siounie
occidentale (actuel Gegharkunik), mais ils se répandent
très vite dans tout le pays, avant d'ultérieurement
connaître une certaine régionalisation.

Le khatchkar élevé à
Garni en 879 par la reine Katranide, épouse du roi
Achot Ier et elle-même originaire de Siounie occidentale,
est souvent présenté comme le plus ancien khatchkar
daté.

Il existe cependant un khatchkar
daté de 876 (Hortun, région d'Ararat). Par
ailleurs, dans la région de Martakert, la base d'un
khatchkar, aujourd'hui disparu, porte la date de 853.

Au début, les stèles
sont massives et dotées d'une ornementation simple.
La partie supérieure est généralement ovale
ou arrondie, mais des khatchkars à la partie inférieure
ovale sont connus, tout comme un unique khatchkar circulaire (1,80
m, Talin).

ce n'est qu'au xe siècle que
la forme entièrement rectangulaire s'impose, et que
dans la seconde moitié du XIIe siècle que la partie
supérieure s'incurve en une corniche, peut-être à
des fins de protection des ornements


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