Etape
21 - Les auberges des langues - L'héritage des chevaliers
de l'Ordre
Samedi 5 avril 2025. Contrairement
au mode de vie de Rhodes, où ils logeaient ensemble dans
des couvents, à Birgu, les chevaliers se répartissaient
par langues. Le gîte et le couvert leur étaient
assurés.

Au départ de la place de la
Victoire, prendre Triq Hilda Tabone à l'angle supérieur
gauche, direction "Auberge de France".

Aux Numéros 21 et 23,
l'Auberge d'Auvergne et de Provence et, juste après, l'Auberge
de France.

L'auberge de Provence, la mieux conservée,
aligne sur sa façade des fenêtres à meneaux
dont l'ébrasement s'élargit progressivement vers l'intérieur
- une astuce optique augmentant la luminosité des
salles tout en réduisant les angles morts défensifs.

Ses gargouilles en forme de
proues de navires évacuaient les eaux pluviales
vers des citernes souterraines encore utilisées aujourd'hui.

A voir plus pour le symbole que pour
l'édifice lui-même, qui héberge des
services administratifs et, parfois, des expositions temporaires.

Peu après, à l'angle
de Triq Hilda Tabone et de Triq Gilormu Cassar, se dresse l'auberge
de Castille et Portugal.

L'auberge de Castille se distingue
par son portail monumental où chaque élément
décoratif - chapiteaux composites, médaillons
héraldiques, rinceaux végétaux - correspond
à un grade hiérarchique précis dans l'organisation
de la langue.

Les analyses récentes ont révélé
des pigments bleu égyptien sous les badigeons,
preuve d'une polychromie originelle aujourd'hui disparue.

Au bout de Triq il-Tramuntana, tournez
à droite dans Triq il-Majiistral. Au numéro 40, voici
la belle auberge d'Angleterre du XVIe siècle, restaurée
en 1989, de style maniériste, qui arbore encore un puissant
balcon en pierre.

L'auberge d'Aragon présente
une cour intérieure où les arcs outrepassés
rappellent l'influence mudéjar, tandis que ses latrines
suspendues sur consoles de pierre anticipaient les normes d'hygiène
modernes.

Les niches des escaliers conservent
des restes de lampes à huile fonctionnant à l'huile
d'olive mélangée de sel marin pour éviter la
fumée.

L'auberge d'Italie, partiellement détruite,
laisse deviner dans ses vestiges un système de chauffage
par hypocauste inspiré des thermes romains.

Les conduits d'air chaud couraient
sous les dalles du réfectoire, maintenues par des
pilettes en terre cuite dont certaines portent encore les estampilles
des ateliers siciliens.

L'auberge d'Allemagne, la plus modeste,
utilisait un appareillage mixte de pierre et brique pour
compenser le manque de moyens.

Ses fenêtres à croisillons
de fer forgé formaient un motif en croix de saint
André visible seulement sous un éclairage rasant.

Revenir sur ses pas pour emprunter,
côté gauche, l'adorable Triq Tramuntana aux
vieilles maisons fleuries.

Aux n° 10-11, se dresse la
Maison Normande, du XIIIe siècle. Elle conserve
une superbe fenêtre gothique à arcades et colonnettes
(la seule de ce type à Malte), et une frise remontant à
un édifice du XIe siècle, à l'époque
où les Normands régnaient sur la Sicile voisine.

Les étoiles au-dessus
sont d'influence arabe. C'est certainement la plus intéressante
de toutes, et elle est ouverte à la visite.

La maison était à l'origine
composée de deux bâtiments distribués autour
d'une cour.

Le numéro 11 n'est pas toujours
accessible, mais si le proprio est là, il pourra vous montrer
les anciennes écuries datant sans doute du IXe ou
Xe siècle et les trois chambres de l'étage.

Celle du fond était dédiée
aux accouchements. Jusqu'au XIXe siècle, les murs
étaient peints, on en voit d'ailleurs des traces, ici
et là, ce qui laisse penser que la maison appartenait à
une famille aisée, probablement un marchand italien.

Ces édifices manifestaient par
leur diversité même l'unité de l'Ordre : mêmes
dimensions de cours intérieures (30x15 pas génois),
mêmes proportions de chapelles (rapport longueur/largeur de
3:1), mais déclinaison distincte des ornements et
couleurs héraldiques.

Leurs cuisines partageaient pourtant
un détail commun - des éviers en pierre ponce
importée de Lipari, matériau idéal pour nettoyer
sans rayer l'étain des ustensiles.

Ces résidences conventuelles,
érigées entre 1574 et 1588, matérialisaient
dans la pierre la structure fédérative de l'Ordre.

Chaque bâtiment conjuguait fonctionnalité
militaire et symbolisme identitaire, adaptant des éléments
architecturaux régionaux aux nécessités maltaises.










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