Etape
15 - La Valette - Une halte aux Upper Barraka Gardens
Samedi 5 avril 2025. Aujourd'hui,
je vais consacrer ma journée à la visite des Trois
cités, enfin tout du moins de deux d'entre elles, Birgu et
de Senglea. Mais pour cela, il me faut d'abord reprendre
le ferry de Sliema à La Valette, puis traverser la capitale
d'Est en Ouest pour me rendre aux Upper Barraka Gardens.

Car c'est ici que se trouve le
fameux ascenseur qui permet de descendre jusqu'au port en contre-bas
depuis lequel accostent les ferry et les bateaux à moteur
qui font la navette entre les deux presqu'îles.

Dominant le Grand Harbour depuis les
hauteurs des bastions Saint-Pierre-et-Saint-Paul, ces jardins
suspendus furent aménagés en 1661 comme lieu de délassement
pour les chevaliers italiens de l'Ordre.

Leur position stratégique, à
près de 60 mètres au-dessus du niveau de la mer, en
fit d'abord un poste d'observation militaire avant de devenir
cet écrin de verdure aux proportions savamment calculées.

L'esplanade centrale, dallée
de pierre de Malta aux reflets dorés, s'articule
autour d'une double colonnade néoclassique où chaque
arcade correspond exactement à l'emplacement d'un ancien
canon de défense.

Les colonnes, légèrement
penchées vers l'intérieur selon une inclinaison de
1,5°, créent une illusion d'optique corrigeant
la perspective depuis l'entrée principale.

Leurs chapiteaux composites mélangent
des éléments doriques et ioniques - synthèse
architecturale reflétant le caractère hybride de La
Valette.

Les parterres géométriques,
dessinés selon les plans originaux du botaniste sicilien
Giovanni Francesco Abela, abritent des espèces méditerranéennes
sélectionnées pour leur résistance aux embruns
: myrtes taillés en forme de navires, lauriers-sauce
aux feuilles épaisses et cireuses, et une collection unique
de sauges aromatiques dont les effluves se mêlent à
l'air marin.

Leur disposition en quinconce permet
d'apprécier différentes combinaisons de textures
et de couleurs selon l'angle de vue.

Le monument à Sir Thomas Maitland,
gouverneur britannique, utilise un marbre de Carrara veiné
de gris qui change de tonalité selon l'heure : bleuté
au petit matin, il prend des reflets rosés au couchant.

Son piédestal, creux, servit
de réserve à poudre pendant la Seconde Guerre mondiale,
comme en témoignent les marques de chariots encore visibles
sur les marches d'accès.

La loggia baroque, ajoutée en
1741, présente une voûte peinte en trompe-l'œil
représentant un ciel peuplé d'oiseaux migrateurs -
allusion subtile aux voyages des chevaliers entre Malte et leurs
commanderies européennes.

Ses bancs de pierre, chauffés
naturellement par un système de conduits captant
la chaleur solaire, restent tièdes longtemps après
le crépuscule.

Le véritable joyau des jardins
demeure leur terrasse panoramique, protégée
par une balustrade où sont encastrés douze canons
de salve datant du XVIIIe siècle.

Ces pièces d'apparat,
jamais utilisées au combat, tirent chaque midi une
salve symbolique dont l'écho se répercute à
travers les criques environnantes.

Leur positionnement suit un alignement
astronomique particulier : le 21 juin, à midi solaire,
leurs ombres s'alignent parfaitement avec les joints des dalles.

Un détail méconnu : les
murs d'enceinte dissimulent des citernes souterraines du
XVIe siècle, alimentées par un ingénieux
système de collecte des eaux de pluie via des gargouilles
en forme de chimères.

Leur volume total de 200 000
litres approvisionnait autrefois les navires en partance pour les
croisades.

Ces jardins, où se mêlent
stratégie militaire et art paysager, offrent une
lecture verticale de l'histoire maltaise.

Depuis leurs promontoires, le regard
embrasse à la fois les vestiges des guerres passées
et la vitalité contemporaine du port, dans un équilibre
fragile entre mémoire et mouvement.

Les cyprès centenaires, penchés
par les vents dominants, semblent eux-mêmes saluer
cette vue incomparable, gardienne silencieuse des secrets de la
Méditerranée.










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