Etape
18 - Les jardins de Safe Haven - Comme un goût de paradis
Samedi 5 avril 2025. Pour accéder
aux jardins de Safe Haven depuis les quais de l'île,
rien de plus simple, il suffit de grimper les escaliers qui ont
été aménagés sur le côté
de la forteresse. De là, on a une vue imprenable sur La Valette.

Ce jardin secret, ignoré
de la plupart des guides touristiques, fonctionne comme
une chambre d'échos végétale où chaque
élément rappelle discrètement l'histoire maritime
de Malte.

Les jardiniers y pratiquent
une taille minimaliste qui respecte les formes naturelles des plantes
tout en évoquant les volumes de l'architecture navale méditerranéenne.

L'ensemble dégage une sérénité
calculée, loin du faste des jardins officiels, comme
si la végétation elle-même avait fini par apprivoiser
la pierre guerrière des fortifications.

Nichée dans une ancienne zone
de stockage de munitions reconvertie, cette oasis urbaine
déploie une végétation paradoxale où
se côtoient espèces endémiques et plantes exotiques
acclimatées.

Le sol, constitué de terre rapportée
mélangée à des fragments de tuf volcanique
importé de Sicile, offre un drainage parfait malgré
les embruns salins qui rongent habituellement les racines.

Les allées serpentent
entre des murs de pierre chaulée dont l'enduit rosé,
composé de chaux et de poudre de brique pilée, change
subtilement de teinte selon l'humidité ambiante.

Leur tracé sinueux reproduit
le mouvement des vagues dans le Grand Harbour visible en contrebas,
une abstraction géométrique que seuls les initiés
décèlent.

Des bancs en fer forgé,
moulés à partir d'ancres médiévales
recyclées, suivent les courbes de niveau originales
du bastion sur lequel le jardin fut aménagé.

La collection botanique privilégie
les espèces résistantes au vent : agaves aux
feuilles épaisses striées de blanc, romarins taillés
en forme de voiles latines, et une rare variété de
myrte nain dont l'odeur camphrée se mêle aux effluves
marins.

Les massifs floraux, disposés
en gradins descendant vers la mer, alternent tonalités
bleutées et blanc cassé pour créer un effet
de profondeur accentué par la perspective maritime.

Un ancien réservoir
d'eau de pluie, transformé en bassin aux parois tapissées
de coquillages fossiles, abrite des carpes koï argentées
qui semblent flotter dans les reflets changeants de la surface.

Son système de filtration, inspiré
des techniques arabes médiévales, utilise
des couches successives de sable corallien et de charbon de chêne
vert.

Le kiosque central, construit
avec des poutres provenant d'une galère de l'Ordre démantelée,
possède une acoustique particulière : son dôme
en cuivre repoussé concentre les sons vers un point focal
où les conversations chuchotées deviennent parfaitement
audibles.

Les motifs gravés sur ses piliers
représentent des plantes médicinales autrefois
cultivées dans le jardin secret des chevaliers hospitaliers.

En contrebas, une terrasse dissimulée
offre des vues inédites sur les docks historiques de French
Creek. Ses pavés irréguliers, récupérés
des cales des navires marchands du XVIIIe siècle, portent
encore les marques des cordages qui les maintenaient comme ballast.
Un cadran solaire miniature, incrusté dans le parapet, indique
non seulement l'heure mais aussi les marées grâce à
un ingénieux système de disques concentriques.



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