Etape
4 - La Valette - Autour de la place et de l'auberge de Castille
Vendredi 4 avril 2025. Depuis le
bastion Saint-James, on débouche naturellement sur l'immense
place de l'auberge de Castille.

Cette place forme un hémicycle
irrégulier où convergent cinq artères aux tracés
divergents. Son sol, pavé de dalles aux bords arrondis par
des siècles de passage, présente une usure différentielle
: les zones les plus marquées tracent d'anciens chemins de
procession disparus depuis la fin de l'Ordre. Le kiosque
central, ajouté sous les Britanniques en 1858, repose sur
une base octogonale creuse abritant un réservoir d'eau relié
à l'ancien aqueduc de Wignacourt – ses robinets en
laiton, rarement utilisés, conservent des joints en cuir
d'origine.

L'auberge de Castille, résidence
officielle du Premier ministre maltais, domine la place par sa façade
méridionale. Son portail baroque, retravaillé
en 1744 sous Manuel Pinto de Fonseca, exhibe un jeu de convexités
inhabituel : les colonnes torsadées s'incurvent vers l'intérieur
tandis que le fronton bombé semble repousser le regard vers
la place.

Les analyses récentes ont révélé
que les pierres sculptées proviennent d'une carrière
aujourd'hui submergée près de Marsaxlokk, leur grain
serré expliquant la conservation exceptionnelle des détails
ornementaux – feuilles d'acanthe, coquilles Saint-Jacques
et trophées militaires.

Le bastion adjacent, intégré
à la structure de l'auberge, présente des meurtrières
transformées en fenêtres au XVIIIe siècle. Leurs
appuis inclinés à 15° vers l'intérieur
permettenttait originellement de viser l'angle mort sous le cavalier
Saint-James. Un escalier en colimaçon dissimulé
dans l'épaisseur du mur mène à une terrasse
supérieure où subsistent les ancrages en fer forgé
d'un télégraphe Chappe installé brièvement
par les Français en 1798.

Les bâtiments coloniaux bordant
la place ouest montrent des adaptations climatiques ingénieuses
: leurs auvents en bois de mélèze, prolongés
de 1,2 mètre au-delà des façades, projettent
une ombre portée calculée pour couvrir toute la largeur
des trottoirs à midi en été. Leurs
balcons fermés (gallariji), peints en vert foncé pour
réduire l'éblouissement, utilisent un système
de jalousies coulissantes actionnées par des contrepoids
en pierre cachés dans les murs.

Au nord, une rue en escalier monte
vers les jardins supérieurs de Barrakka. Ses marches,
légèrement concaves au centre, portent des rainures
transversales destinées à éviter le glissement
des chevaux – détails datant de l'époque où
des mulets y transportaient des ballots de coton vers les entrepôts
du port. Les maisons mitoyennes, hautes et étroites,
alignent des portes cochères surmontées d'ancres marines
en relief, vestiges des logements attribués aux capitaines
de galères de l'Ordre.



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