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Malte - De La Valette aux Trois Cités - Avril 2025

Etape 11 - La Valette - Le fort Saint-Elme, le bastion imprenable de l'ordre de Saint-Jean

Vendredi 4 avril 2025. Enfin, nous y voilà, voici le fort Saint-Elme, l'un des symboles fort de la résistance maltaise face à l'envahisseur ottoman lors du grand siège de 1565.

Dressé sur l'éperon rocheux du mont Sceberras, le fort Saint-Elme déploie une silhouette anguleuse qui épouse les contours de la péninsule.

Sa forme d'étoile à quatre branches, conçue par l'ingénieur Pietro Pardo en 1552, représente une transition entre les fortifications médiévales et le système bastionné moderne.

Les murs extérieurs, inclinés à 15° pour dévier les tirs de canon, utilisent un calcaire corallien dont les fossiles marins visibles attestent de l'origine locale de la pierre.

L'entrée principale, protégée par une tenaille dissimulée dans le glacis, est accessible via un pont-levis dont les chaînes originales en fer forgé sont encore actionnées par le mécanisme à contrepoids du XVIe siècle.

Les vantaux de la porte, épais de 12 cm et renforcés de clous à tête carrée, portent les impacts de mousquetaires ottomans lors du Grand Siège de 1565 - certains projectiles étant encore fichés dans le bois.

La cour intérieure, pavée de dalles irrégulières usées par les allées et venues des garnisons, est entourée de casemates voûtées où l'épaisseur des murs (jusqu'à 8 mètres à certains endroits) crée une régulation thermique naturelle.

Les ouvertures des embrasures à canon, évasées vers l'intérieur, sont calculées pour un angle de tir de 110° couvrant à la fois le grand port et la rade de Marsamxett.

La chapelle castrale, dédiée à saint Ange, conserve sous son enduit moderne des fresques du XVIIe siècle représentant des scènes navales dans un style naïf - probablement l'œuvre d'un soldat-artiste.

Son autel baroque incorpore des boulets de canon turcs fondus en croix, tandis que les bancs en bois de pin d'Alep montrent des graffiti de marins gravés au couteau entre le XVIIe et le XIXe siècle.

Le bastion nord, reconstruit après le siège de 1565, présente une particularité défensive : ses murs intègrent des pierres tombales des chevaliers tombés pendant l'assaut, recyclées comme matériau de construction.

Les analyses archéologiques ont identifié des fragments d'inscriptions funéraires en français, italien et castillan noyés dans la maçonnerie.

Le système hydraulique du fort, alimenté par une citerne de 200 000 litres creusée dans le rocher, comprend des canaux de distribution en terre cuite qui alimentaient à la fois les cuisines, les latrines et les forges.

Un ingénieux mécanisme de filtration utilisant des couches alternées de sable et de charbon de bois assurait la potabilité de l'eau même pendant les sièges prolongés.

Aujourd'hui, les anciennes poudrières abritent des collections d'armures où l'on peut observer l'évolution de la protection individuelle face à l'artillerie - depuis les harnois complets du XVIe siècle jusqu'aux cuirasses allégées du XVIIIe.

Les vitrines exposent des objets personnels retrouvés lors des fouilles : dés en os, pipes en terre, médailles religieuses déformées par l'explosion des magasins à poudre.

Ce fort, à la fois monument historique et prototype d'architecture militaire, incarne les mutations de la guerre de siège en Méditerranée - chaque modification de sa structure correspondant à une adaptation tactique face aux progrès de l'artillerie.

Ses pierres gardent la mémoire des trois vies successives du bâtiment : avant-poste des chevaliers, caserne britannique, et aujourd'hui lieu de mémoire où résonnent encore les échos des batailles passées.

La construction du fort Saint-Elme s'engagea selon des méthodes qui révolutionnèrent l'architecture militaire méditerranéenne.

Les fondations furent creusées dans le calcaire globigérin à l'aide de coins métalliques chauffés à blanc puis refroidis brutalement avec de l'eau de mer, provoquant l'éclatement de la roche selon des lignes de fracture prévisibles. Cette technique, héritée des carriers phéniciens mais perfectionnée par les ingénieurs de l'Ordre, permit d'extraire des blocs aux dimensions parfaitement calibrées pour les assises inférieures.

Le transport des matériaux mobilisa une flottille de barges spécialement conçues, dont les coques plates pouvaient s'échouer directement sur les rochers au pied du chantier.

Les pierres les plus massives, dépassant parfois cinq tonnes, étaient halées à terre grâce à un système de treuils actionnés par des équipes de buffles d'eau importés de Sicile, animaux choisis pour leur patience et leur puissance constante.

Les maîtres maçons développèrent un mortier exceptionnel en incorporant à la chaux traditionnelle des cendres volcaniques du Vésuve et des fragments de poterie romaine broyée, créant ainsi un liant qui durcissait plus rapidement au contact de l'air marin.

Ce mélange, dont la recette exacte se perdit au XVIIIe siècle, explique l'incroyable résistance des joints originaux encore visibles dans les parties basses des murailles.

L'élévation des murs suivit un processus méticuleux où chaque assise de pierre était préassemblée à terre avant d'être hissée en position.

Les tailleurs utilisaient des gabarits en bois de cyprès pour vérifier l'angle exact de chaque face, ajustant au ciseau les moindres irrégularités qui auraient pu affecter la trajectoire des tirs défensifs.

Les blocs d'angle, particulièrement soignés, portent encore les marques des outils à dents utilisés pour leur finition.

La construction des voûtes intérieures nécessita la mise en place d'un échafaudage complexe dont les arcs en bois de mélèze épousaient exactement la courbure des futures coupoles. Les charpentiers génois employèrent une méthode de cintrage humide où les poutres étaient maintenues en forme par des cordages en fibres de palmier avant séchage, technique habituellement réservée aux chantiers navals.

 

 

 

 

 

 

 

 

 
 
 

 
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