La longue et riche
histoire manufacturière d'Aubenas
Dimanche 21 mars 2021.
Un peu d'histoire. Dès le Ve siècle, la colline
est l'objet d'une lutte tenace entre les évêques du
Puy et ceux de Viviers pour la construction d'une place forte.

Finalement l'évêque du
Puy sort victorieux de ce long conflit et au XIe siècle (1084)
inféode cette nouvelle possession au baron de Montlaur (ou
Montlor), héritier des Ucel et originaire de la montagne
ardéchoise (les Montlaur/Montlor dominaient le centre-ouest
de l'actuel département de l'Ardèche, entre le lac
d'Issarlès et la haute vallée de l'Ardèche
: châteaux dits de(s) « Montlaur ou Montlor »
à Coucouron, Mayres, Montpezat).

Cette famille règne de 1084
à 1441 et construit le donjon, le mur d'enceinte
et les deux grosses tours rondes du château qui est alors
entouré de fossés.

C'est pourquoi l'on appelle Aubenas
« la cité des Montlaur », seigneurs qui
furent à l'origine non seulement de l'essor économique
de la ville, mais aussi du développement social et matériel
de ses habitants. Leur devise était : « Montlaur, au
plus haut ! »

Aubenas est connu pour avoir été
un haut-lieu de la confection de soie. En effet, la famille
Deydier de Sauveroche y implanta une manufacture dont la soie fut
reconnue par de nombreuses cours occidentales.

Le 5 septembre 1752, le roi "en
son conseil" demande la création de la manufacture
royale de filage et dévidage de la soie à Aubenas.

Celle-ci sera équipée
de moulins conçus par Jacques de Vaucanson (1709 -1782)
et commandés par le Roi.

L'implantation de cette manufacture
se situe à Ucel, en bordure de la rivière
Ardèche, tout près d'Aubenas.

Elle est assortie d'une école
de formation pour les fileuses et moulineuses, aux nouvelles machines
dans le cadre du programme de rénovation de l'industrie de
la soie lancé en France par Trudaine.

Les travaux commencèrent sur
les espaces nécessaires : terrain de la veuve Tailhand
au Boisset, moulins du nommé Grandpré, le tout pour
11 000 livres. Le devis qu'avait fait exécuter Vaucanson
par un architecte de Paris atteignait 100 000 écus pour la
construction.

Le moulinage se détachait particulièrement
avec ses deux avant-corps latéraux et son atelier
voûté qui inspirera d'autres constructions industrielles.

Les plans avaient été
dessinés par l'académicien Guillot Aubry. Les
bois provenaient de Suède. La clarté, l'aération
de salles étaient prévues.

Les tours de tirage (filature) réduisaient
les déchets. Les moulins, certes couteux, économisaient
la force motrice et donnaient une très belle soie.

La manufacture jouissait d'une grande
réputation, si bien que le Roi offrit à la
famille Deydier la construction de nouveaux Moulins et du Château
d'Ucel.

Les Organsins Deydier (sortes de soie
qui s'emploient dans les étoffes de soie), de qualité
supérieure, se vendaient à Lyon plus cher que ceux
du Piémont.

Holker (1756) et Rodier (1758), inspecteurs
des manufactures, signalèrent superbement la qualité
des mécaniques de Vaucanson ainsi que la valeur de celui-ci
et de Deydier. Holker qualifie les machines de Vaucanson
de « plus bel ouvrage » qu'il ait jamais vu
de sa vie « dans ce genre ».

Vaucanson place dans cet atelier, 25
moulins d'organsinage, autant de moulins de dévidage et 60
tours de tirage : de quoi faire pendant dix ans au moins six milliers
d'organsins chaque année.

Le bassin d'Aubenas comptait déjà
deux autres Manufactures Royales, une de laine et une de
coton. Une « condition de soie » y est encore implantée
par décret impérial en 1854, pour contrôler
les produits utilisés par les industriels.

Le volume des matières traitées
situe alors Aubenas parmi les plus grandes places européennes,
derrière Lyon et Saint-Étienne mais devant Avignon.

La « condition des soies »
qui fonctionnera jusqu'au début du XXe siècle sera
à l'origine de la Chambre de Commerce et d'Industrie
créée en 1869.

Les machines, très performantes,
nécessitaient un entretien et des réglages minutieux.
Il fallait former des techniciens.

Les décideurs des États
du Languedoc refusèrent d'investir davantage et la
belle manufacture périclita.

Toutefois, Bourceret, élève
de Vaucanson apporta plus tard, des modifications qui réduisirent
les coûts de maintenance. Les machines modernes d'aujourd'hui
comportent des engrenages créés par Vaucanson.

Le
plateau de Jastres au coucher du soleil
Le
franchissement du col du Gourdon
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