Etape
5 - Musée de Lille - Chefs-d'oeuvres du Moyen Age
Mercredi 11 décembre 2019.
Comme je l'ai déjà dit les sous-sols du musée
des Beaux-Arts de Lille*** regorge de fabuleux trésors.
A ne surtout pas manquer, l'extraordinaire collection de
bas-reliefs provenant de différentes églises de la
région, des Flandres et de plus loin encore, des lointaines
contrées hollandaises ou espagnoles.



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Eblouissante
également, cette Marie en technicolor, conçue
à la fin du XVe siècle***. Cette Vierge
à l’Enfant est sans conteste la plus
belle statue médiévale des collections du musée.
Bien qu’elle soit surnommée « Vierge de
Saint-Sauveur » (un cartel ancien mentionne qu’elle
provient de l’église lilloise du même nom),
nous ignorons tout de sa provenance exacte… La Vierge,
à la silhouette élancée et légèrement
déhanchée, est vêtue de deux robes et
d’un manteau doré aux plis amples qui soulignent
sa majesté. Elle portait à l’origine une
couronne, aujourd’hui disparue. Elle tient
dans ses bras son fils Jésus-Christ, à demi-nu.
Malgré les mutilations subies, cette figure
témoigne de l’attention du sculpteur au rendu
de l’anatomie. Le décor des vêtements et
la finesse des traits du visage mettent en valeur la virtuosité
du ciseau du sculpteur. L’exceptionnelle qualité
de la Vierge à l’Enfant incite à penser
qu’il s’agissait d’une commande
très prestigieuse pour un édifice religieux
de la région. Lequel ? Le mystère reste entier… |



Parmi les nombreux chefs-d'oeuvres,
il faut aussi regarder de près le monument funéraire
de Guillaume Dufay*** qui fut l’un des plus
grands musiciens du XVe siècle, si célèbre
qu’il composa la musique jouée lors de l’inauguration
de la cathédrale de Florence, le célèbre Duomo,
en 1436.

L’inscription qui figure sur
le monument décrit certains aspects de la vie de ce compositeur
et musicien qui voyagea en Europe, mais passa une grande partie
de sa vie à Cambrai, dans le nord de la France. Dufay est
lui-même représenté sur son relief. Il est à
genoux, en prière devant la scène de la Résurrection
du Christ qui enjambe son tombeau, en présence de
deux gardes.

Ce relief fut découvert à
Cambrai. En effet, dans son testament, Guillaume indiqua
vouloir se faire inhumer dans la cathédrale de cette ville.
Il passa donc commande au sculpteur Alart Génois d’un
relief funéraire en pierre bleue de Tournai. Suite
à la destruction de l’édifice à la Révolution,
l’œuvre fut réutilisée comme matériau
de construction. Elle fut retournée, face contre terre, et
utilisée comme la marche d’un puits ! Elle
fut finalement retrouvée en 1859, puis acquise par le musée
en 1890. Depuis, elle représente un des
plus beaux exemples de la sculpture funéraire dans la partie
occidentale de la Flandre à la fin du Moyen Âge.


Je reste également
subjugué par ces extraordinaires bas-reliefs
polychromes d'une infinie délicatesse, représentant
chacun des épisodes bibliques de la vie de Jésus. |
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A ne pas manquer non plus, le Repas chez
Simon, daté du XVe siècle***. Décrit
dans le Nouveau Testament, cet épisode raconte que,
lors d’un repas en compagnie des apôtres, Jésus
est approché par Marie-Madeleine, une courtisane qui lui
lave les pieds, les essuie avec ses cheveux puis les parfume en
signe d’humilité. Marie-Madeleine, représentée
ici au premier plan, voit alors ses péchés pardonnés
par le Christ. Cette plaque est ainsi la seule connue à
ce jour à figurer le Repas chez Simon. Par ailleurs
quelques détails font référence à la
vie quotidienne : par exemple les deux chiens rongeant des
os, placés aux pieds des apôtres. Ils donnent
à la scène un caractère intimiste et familier,
qui devait plaire au commanditaire.

Autre chef-d'oeuvre absolu à
ne surtout pas manquer, l'extraordinaire retable portatif
: déposition de Croix., daté du début du XVIe
siècle***. La fabrication des retables est un marché
florissant à la fin du Moyen Âge. Les formes,
les dimensions et les sujets représentés – standardisés
ou sur-mesure – s’adaptent à leur fonction. Les
commandes privées, toujours plus nombreuses, conduisent à
la réalisation de petits retables. Quand l’offre
répond à la demande…

Le retable de Lille est le
fruit d’une commande spécifique. La scène centrale,
la Déploration, c’est-à-dire la représentation
de la Vierge contemplant le corps du Christ mort après la
Crucifixion, est fréquente. En revanche, les figures
des volets, sainte Véronique à gauche, et sainte Hélène
ou sainte Élisabeth de Hongrie à droite, sont beaucoup
plus originales : le commanditaire de l’œuvre
a expressément demandé à ce qu’elles
soient présentes ici !
Un autre indice en faveur d’une commande réside
dans la composition de l’objet. Un retable se compose habituellement
d’une structure (la caisse) dans laquelle les figures et les
éléments décoratifs sculptés séparément
sont installés. Ici, les personnages ont été
taillés dans le même bloc que la caisse, ce qui demande
bien plus de dextérité et de temps. De même,
les volets, sculptés sur une face, sont plus coûteux
à produire que des volets peints. Le propriétaire
de l’objet était donc en capacité de s’offrir
un objet de grande qualité. La technique originale de la
sculpture a permis de rapprocher l’œuvre d’un
groupe de retables produits dans les anciens Pays-Bas au début
du XVIe siècle.



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