Etape
3 - Gand - En flânant le long du quai aux Herbes
Mardi 15 août 2023. Après
avoir passé un bon moment assis à une terrasse de
café face au château des Comtes à déguster
une bonne bière-maison, on s'en retourne en arrière
pour apprécier enfin la beauté du quai aux Herbes
au moment où ses façades commencent à blondir
sous les effets de l'heure dorée.

Car pas question pour moi de
laisser Gand et ses extraordinaires façades à pignon
sans les avoir photographiées au moment le plus propice de
la journée. Voilà tout l'art d'attendre à
la terrasse d'un café pour profiter du moment M.

Et vers 18 h 30 (hélas, nous
sommes en été...), la lumière du soleil
commence en effet à être intéressante pour saisir
toute la beauté de ces façades. Ma soeur
qui a le sourire aux lèvres a l'air particulièrement
d'accord avec moi, ce soir.

Ce Quai aux Herbes est situé
le long de la rivière Lys (Lieve en néerlandais) et
est connue pour son architecture médiévale bien préservée.
Il est l'une des rues les plus pittoresques de la vieille ville
de Gand.

La rue doit son nom aux herbes
médicinales qui étaient traditionnellement vendues
sur le marché ici au Moyen Âge.

Aujourd'hui, elle est bordée
de superbes bâtiments historiques, de cafés, de restaurants
et de boutiques.

La plus ancienne façade est
romane, certaines de ces maisons ont vu leur façade
refaite aux XVIIe et XVIIIe siècles, d'autres ont fait l’objet
de restaurations parfois hardies (voire sont le résultat
de reconstructions) effectuées au début du XXe siècle,
en vue de l’exposition universelle de 1913.

Le nom de Graslei n’a été
donné qu’à partir du milieu du XVIIIe
siècle ; auparavant, le quai s’appelait Korenlei (quai
aux Grains), comme se nomme encore aujourd’hui la rue sur
la rive opposée.

Mais le port sur la Lys, le
premier à Gand à avoir été doté,
dès 1562, d’un quai en pierre, a toujours
été désigné par les bateliers du nom
de Tusschen Brugghen (soit: Entre Ponts).

Les marchands de céréales,
dont la marchandise était en majeure partie en provenance
de Picardie, devaient ici s’acquitter de l’octroi et
du tonlieu (taxe d’entreposage et de vente, à concurrence
d’un quart de la cargaison) auprès des percepteurs
municipaux, qui avaient leur bureau dans une maisonnette à
droite du Spijker.

Le tonlieu sur le blé fut aboli
dans la première moitié du XVIIIe siècle, mais
avait déjà beaucoup perdu de sa rigueur dès
le XVe, les autres villes flamandes faisant de plus en plus appel
à d’autres filières pour se soustraire au tonlieu
gantois.

Dans les environs du Graslei, on
comptait au XVIe siècle jusqu’à 150 entrepôts
à grains, y compris privés (les beerie). Lors
de travaux de rénovation pratiqués derrière
les maisons du quai ont été mis au jour les parois
d’un canal, creusé perpendiculairement à la
Lys, et destiné sans doute à desservir les entrepôts
à céréales bordant la toute proche place du
Marché-aux-Grains (Korenmarkt).

Le long du Quai aux Herbes, on compte
dix édifices notables. A commencer par De Verberrende
Steen (maison brûlée) : datant du XIVe siècle,
ce steen (maison en pierre) fut remanié en 1725, mais sans
que le cœur du bâtiment en fût altéré.

De Beerie (Graslei n°5). Derrière
la façade baroque de 1726 se cache une construction
beaucoup plus ancienne, remontant au Moyen Âge.

Den Witten Leeuw (Le Lion blan', Graslei
n°6) est mentionné pour la première fois
en 1349 sous le nom de Middelhuus. Cet édifice fut exhaussé
en 1786 et sa façade à pignon changée en mur
gouttereau.

Graslei n°7 : son aspect actuel
est probablement dû pour une grande part à
l’imagination de l’architecte A. R. Janssens, chargé
de le restaurer en 1913.

Maison Den Enghel (l'Ange, Graslei
n°8) : cette façade, caprice de l’architecte Janssens,
est en réalité une copie, réalisée en
1912, d’une autre façade gantoise, située rue
de Catalogne, à laquelle furent en outre incorporés
des éléments du gothique brabançon. Le
cœur du bâtiment est une construction du Moyen Âge,
et l’entresol a même conservé la maçonnerie
ancienne. Le bâtiment servit de siège à la corporation
des brasseurs du milieu du XVe au milieu du XVIe siècle.

Eerste Korenmetershuis (Première
Maison des mesureurs de grains, Graslei n° 9) : cet édifice
fut de 1435 à 1540 le premier siège de la
corporation des mesureurs de grains. Ceux-ci étaient
chargés, d’une part, de mesurer le blé déchargé
à Gand (en remplissant de blé jusqu'à ras bord
des cuves de bronze calibrées) et d’autre part, de
fixer la quantité de blé pouvant être commercialisée
sur le marché gantois.

Maison romane de Gand ou Spijker (Graslei
n° 10) : c’est la « vedette » du Graslei,
et la maison la plus ancienne. Édifié en pierres gris
sombre, pour la plupart non équarries, il attire l’attention
par son aspect ancien et austère, presque lugubre.
Le nom de cet édifice, archaïsme régional désignant
un entrepôt est parfois traduit en français par Étape
des grains (ou Étape du blé), étape étant
à entendre ici au sens ancien d’entrepôt ou de
magasin de vivres.

La date de sa construction ne peut
être déterminée avec exactitude, mais
le style architectural, similaire à celui du Borluutsteen
sur le Marché-aux-Grains, et caractéristique de l’architecture
civile de la période romane, donnent à supposer
que le Spijker a pu être construit au XIIe siècle.

Il est mentionné dans un texte
de 1323, à l’occasion d’un remaniement et d’une
extension. Les fenêtres, à arc plein cintre,
se fermaient à l’aide de vantaux de bois et servaient
à la ventilation. Après un incendie, qui en dévasta
tout l’intérieur en 1896, le bâtiment fut complètement
restauré en 1902. Il héberge actuellement
un restaurant huppé.

Maison du Tonlieu (Tolhuisje, Graslei
n° 11) : cette maisonnette, jadis un des lieux les plus fréquentés
du port, fut érigée en 1682, probablement
pour remplacer une maison d’octroi antérieure en bois.
Y tenaient bureau les percepteurs municipaux chargés de percevoir
les droits d’entreposage. Elle fut fidèlement
restaurée en 1912.

Tweede Korenmetershuis (Deuxième
Maison des mesureurs de grains, Graslei n°12) : cet édifice
fut acquis par les jaugeurs de blé en 1540, pour remplacer
l’immeuble du n°9. À la façade en
bois originelle, le propriétaire substitua en 1698 l’actuelle
façade, en brique et grès, de facture générale
gothique, mais parsemée d’éléments baroques.
Cette maison également fut (fidèlement) restaurée
au début du XXe siècle.

Maison des Francs-Bateliers (Gildenhuis
der Vrije Schippers, Graslei n° 14 — il n'y a pas de n°
13) : l'immeuble acheté en 1530 par la guilde des
francs bateliers fut dépouillé un an plus tard de
sa façade de bois et doté d'une nouvelle façade
de style gothique, mais présentant çà et là
quelques éléments renaissance. Le panneau au-dessus
de la porte d’entrée est orné d’une caravelle
sculptée.

Les pierres de parement comprises entre
les fenêtres du 2e et du 3e étage portent les
armoiries de Charles Quint, ainsi que les armes de Flandre, de Gand,
et des trois territoires sur lesquels s’étendait son
règne (Bourgogne, domaine des Habsbourg, et Castille et Léon).






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