Un château
fort qui a su traverser l'histoire
Samedi 10 août 2019.
Avec son donjon de 50 mètres, le château de
Vincennes est l’une des plus hautes forteresses médiévales
d’Europe. Il est aussi le plus vaste château royal français
encore debout !

Depuis huit siècles, le
château de Vincennes est lié à l’histoire
de la France comme peu d’édifices médiévaux.
Il abrite la seule résidence d’un souverain médiéval
qui subsiste en France.

C’est la seconde résidence
des rois après le Palais de la Cité aux XIIe
et XIIIe siècles et après le Louvre à partir
du XIVe siècle.

Le château occupe, dès
la Renaissance, une fonction de prison royale et accueille bon nombre
de célèbres prisonniers.

Dès le XIIe siècle, le
site, situé non loin du bois de Vincennes, abrite une résidence
de chasse. On l’appelle le manoir capétien,
du nom de la dynastie des rois qui l’a édifié.
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Le manoir est le lieu de séjour préféré
des souverains lorsqu’ils veulent s’échapper
de Paris. Saint Louis y séjourne régulièrement
au XIIIe siècle et donne une importance nouvelle
à Vincennes qui devient un lieu de gouvernement et
de réunion du Conseil, ainsi qu’une résidence
familiale où la reine séjourne.
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Les rois succédant
à Saint Louis continuent de résider à
Vincennes de manière régulière. Louis X (1314-1316)
y est né et y a vécu presque sans discontinuité
jusqu’à sa mort.

Philippe
VI (1328-1350), le premier Valois, accorde beaucoup d’importance
à Vincennes. Sous son règne, le manoir reste une résidence
familiale qui accueille femmes et enfants. Mais c’est
également un lieu de décisions politiques majeur.

C’est,
par exemple, à Vincennes que sont prises les décisions
liées à la préparation de la guerre de Cent
Ans qui éclate en 1337.

Les fouilles archéologiques
menées depuis la fin du XXe siècle et les découvertes
réalisées lors de la restauration du donjon ont
mis au jour des témoignages de la vie quotidienne de la cour
royale au Moyen-Âge.

On y trouve les traces de la
présence de grands seigneurs, d’ecclésiastiques,
de fonctionnaires, et de plusieurs centaines de serviteurs.

Se dessine également l’organisation
de la vie quotidienne : les contours de l’approvisionnement
en eau, l’éclairage, l’usage des lieux et les
techniques de construction.

La construction du donjon démarre
vers 1340, en pleine guerre de Cent Ans.

Charles V arrive au pouvoir
en 1364 et décide de bâtir à Vincennes une véritable
ville royale fortifiée. Il souhaite faire du château
le siège de son gouvernement, guidé par la volonté
de rationaliser l’exercice du pouvoir en organisant l’administration
du royaume. Son règne marque la naissance de l’Etat
moderne. Il choisit le site de Vincennes pour son dessein, en raison
de l’histoire et du prestige du lieu.

Charles V délaisse le manoir
pour s’installer dans le donjon en 1367-1368. Une
fois le donjon achevé, il ordonne la construction d’une
enceinte rectangulaire rythmée de neuf tours et entourée
de douves. La construction est extrêmement rapide.

Une garnison militaire importante
est installée avant même la construction de l’enceinte.
Les travaux sont confiés au maître des œuvres,
Raymond du Temple.

Le raffinement et le foisonnement
des décors sculptés sont à l’image de
Charles V, roi amoureux des arts.

La richesse qui se dégage de
l’ensemble affirme également sa puissance à
une époque de contestation de son pouvoir. D’une
part, le roi d’Angleterre, descendant direct de Philippe le
Bel, roi capétien, revendique le trône, d’autre
part, le peuple, accablé par la guerre et ses conséquences
économiques, remet en question la légitimité
de Charles V. C’est l’époque de la Grande Jacquerie
(révoltes paysannes), mais aussi de la révolte d’Etienne
Marcel (prévôt des marchands de Paris).

Charles V, roi très pieux, commande
également la construction de la Sainte-Chapelle,
peu avant sa mort en 1380. Elle représente la
dernière pierre de l’ensemble palatial qui vient affirmer
la dimension chrétienne de la royauté française.

Cet édifice abritait des
fragments des reliques de la Passion rapportés par Saint
Louis au XIIIe siècle, conservés par la suite dans
la Sainte-Chapelle de l’Île de la Cité à
Paris, construite à cet effet entre 1242 et 1248.

La Sainte-Chapelle de Vincennes
ne sera achevée qu’à la Renaissance
par l’architecte Philibert Delorme.

De plus, l’oratoire du
roi situé dans la Sainte-Chapelle abrite le tombeau du duc
d’Enghien, fusillé dans le fossé Sud du château
et enterré sur place en 1804, accusé à
tort d’un complot contre Napoléon.

Dix ans plus tard, Louis XVIII
fait déposer ses restes dans un tombeau entouré de
quatre statues (le Duc, la Religion, la France enchaînée
et le Crime). Depuis 1852, cet ensemble monumental se trouve donc
dans l’oratoire du roi, et une colonne commémorative
se trouve à l’endroit de l’exécution du
duc

La silhouette massive du château
et son donjon, témoin de l’architecture défensive
la plus aboutie du milieu du XIVe siècle, abrite avant tout
une résidence royale. Les rois de France se contentent d’y
séjourner brièvement.

Les rois y viennent chasser
ou se protéger des agitations de la capitale. Mais ils n’oublient
pas la dimension symbolique du château de Vincennes
comme haut lieu du pouvoir royal.

François Ier vient assez souvent
à Vincennes et fait quelques travaux de restauration
du château. C’est ce dernier, ainsi qu’en Henri
II, qui font achever la construction de la Sainte-Chapelle en respectant
son style gothique. Le seul roi ne séjournant pas
à Vincennes est Louis XVI.

Le roi Louis XIV participe
lui aussi à l’évolution du lieu en confiant
à Louis Le Vau la construction du pavillon du roi et celui
de la reine.

Un portail de style classique vient
séparer la partie moderne de la partie médiévale
avec, en prime, l’abaissement de la tour du Bois pour en faire
un Arc de Triomphe. Mais l’installation de la cour
à Versailles en 1682 sonne l’abandon du château
de Vincennes comme résidence royale.

Louis XV revient ponctuellement
à Vincennes à l’occasion de parties de chasse.
Peu à peu délaissé, le château est rayé
de la liste des résidences royales en 1784 et devient
pour un temps une manufacture de porcelaine (qui sera plus tard
déplacée à Sèvres).

Dès la Renaissance,
le donjon se transforme ponctuellement en prison royale.
Pour adapter le donjon à cet usage carcéral, les
fenêtres des trois premiers étages ont été
murées ou pourvues de barreaux. Il abrite ainsi,
pendant cinq siècles, des prisonniers dont certains de renom.

Pendant la Révolution
française, le donjon devient à nouveau une prison.
Mais la population parisienne s’oppose à ce projet.

Le château est sauvé
de la destruction par le marquis de La Fayette. Puis, quelques
années plus tard, le Directoire y installe l’Arsenal.
Cette affectation militaire sauve le monument, contrairement à
la prison de la Bastille. Sous la Restauration (1815-1830)
et la monarchie de Juillet (1830-1848), les troupes de la garde
royale assurant la protection des gouvernants s’y installent.

La sainte-chapelle
du château de Vincennes
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